Une approche en santé mentale adaptée aux populations autochtones

La santé mentale décrit la capacité des individus et des groupes à interagir les uns avec les autres, et avec leur environnement, de façon à promouvoir un bien-être subjectif ainsi que le développement et l’utilisation de leurs habiletés mentales. Le point central de cette définition est que la santé mentale ne se limite pas à l’absence de maladie, mais un état de bien-être positif. 

Cette vision holistique et positive de la santé mentale correspond à celle de plusieurs peuples autochtones. De plus, les notions de bien-être, de maladie et de guérison représentent des éléments fondamentaux du discours sur l’identité de plusieurs groupes autochtones, pour lesquels la santé de la famille, du groupe et de la communauté occupe une importance primordiale. 

Malgré une multiplication des interventions et des services offerts aux Autochtones, pourquoi certaines communautés affichent-elles toujours des taux disproportionnés de problèmes psychosociaux, dont des troubles mentaux? Une hypothèse possible est la prédominance du modèle déficitaire de la santé qui entraîne une médicalisation, des enjeux de pouvoir et une négation non intentionnelle de la réalité culturelle, locale et expérientielle de l’usager, de ses besoins et de ses attentes. 

Il devient de plus en plus évident que l’amélioration de la santé mentale des autochtones ne peut pas être atteinte uniquement au moyen des pratiques de santé occidentales. Cette responsabilité appartient non seulement aux services dits traditionnels, mais aussi aux Autochtones eux-mêmes, pour qui les traditions de guérison représentent un aspect important et vivant de leurs cultures.

Il est possible d’intégrer des pratiques de soins traditionnels autochtones aux services cliniques occidentaux. Cette intégration peut avoir des effets bénéfiques sur la santé mentale des Autochtones. On parle alors de pratiques interdisciplinaires dans lesquelles les méthodes de guérison traditionnelles sont considérées au même titre que d’autres traitements (p. ex. : TCC; pharmacothérapie) et utilisées en complémentarité avec les pratiques occidentales plus conventionnelles selon les désirs et les besoins de l’usager.

Un exemple d’une telle intégration est le Protocols, dont le but est d’amener le clinicien à fournir un service culturellement sécuritaire (culturally safe) et adapté au contexte local de la personne. Dans cette approche, la relation entre l’intervenant et l’usager est égalitaire et l’usager est soutenu et encouragé à prendre en charge sa guérison et son rétablissement.

Le fait de placer l’usager, sa conception de sa maladie et ses attentes au centre de l’intervention, qui intègre également des pratiques traditionnelles, peut aider à développer le lien de confiance avec l’intervenant, en plus d’augmenter l’adhérence au traitement. Ainsi, cela suscite une amélioration des effets thérapeutiques, tout en réduisant la pression sur les proches et les prestataires de services.

L’intégration de la pratique de guérison traditionnelle autochtone, ainsi que la responsabilisation de l’usager dans la relation d’aide, jouent alors un rôle de premier plan dans l’augmentation du pouvoir d’agir et d’autodétermination des individus, des groupes et des communautés autochtones.

Dans cette optique, ce dossier thématique se veut un espace de réflexion et de dialogue basé sur la collaboration destinée à améliorer la santé mentale des Autochtones. Une perspective holistique de la santé mentale devrait guider les interventions en les basant d’abord et avant tout sur les besoins des Autochtones tels qu’ils les ont eux-mêmes définis.

 

Un commentaire pour "Une approche en santé mentale adaptée aux populations autochtones"

  1. Il est indubitable que la santé mentale des Autochtones ne peut pas être atteinte uniquement par des pratiques de santé occidentales. Les interventions doivent, en effet, être respectueuses de la réalité de la clientèle autochtone pour être efficaces. Toutefois, l’intégration des pratiques dites « traditionnelles » aux services cliniques occidentaux demeure insensée dans plusieurs communautés autochtones. Prenons, à titre d’exemple, les communautés inuit du Nunavik.

    Comme le mentionne l’Étude contextuelle sur les services de santé mentale au Nunavik de l’INSPQ, un des plus importants facteurs compromettant la santé mentale chez les Inuits de la région est la discontinuité culturelle. Les changements culturels rapides, les traumatismes et les perturbations causées par les années passées dans les écoles résidentielles, les épidémies de grippe espagnole et les relocalisations forcées à Grise Fjord et Resolute Bay ont créé des fossés entre les générations et, ainsi une rupture dans les traditions, le savoir et la culture inuit. Comment peut-on intégrer des pratiques « traditionnelles » aux services cliniques alors que l’identité culturelle même de telles communautés est aussi problématique pour la santé mentale ?

    Ainsi, si une perspective holistique de la santé mentale doit guider les interventions en les basant d’abord et avant tout sur les besoins des Autochtones, ce n’est pas l’intégration des pratiques « traditionnelles » qu’il faut prioriser. Pour plusieurs communautés autochtones, le plus urgent de ces besoins est de redevenir une communauté et de retrouver une identité culturelle significative. Les interventions doivent donc aller au-delà des modèles de la santé occidentales pour favoriser une guérison collective par l’entremise d’actions communautaires.

     

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